Les valeurs du service public : la neutralité

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Le principe de neutralité est un corollaire du principe d’égalité. Comme pour l’intégrité, il s’agit d’une valeur essentielle à la confiance nouée entre les citoyens/usagers et les pouvoirs publics. La neutralité garantit à chacun  d’être traité de la même manière, indépendamment de nos opinions, que l’action des services publics ne sera pas guidée par le favoritisme et qu’il sera assuré sans considération des opinions politiques ou religieuses des personnels ou des usagers. « La neutralité est la loi commune de tous les agents publics dans l’exercice de leur service » (Jean Rivéro).

Le principe de neutralité a trouvé plusieurs domaines d’application : Par exemple, il est interdit de distribuer des écrits de nature politique dans les locaux d’un service public ; les formulaires de candidature à un concours public ne doivent pas comporter de demandes de renseignement sur les opinions politiques, religieuses ou syndicales ; une réunion de groupements politiques d’élèves ne saurait être autorisée dans un lycée public. Deux illustrations du principe de neutralité méritent d’être abordés de façon approfondie : la laïcité et la dépolitisation des services publics

C’est sur le terrain de la laïcité que le principe de neutralité a fait l’objet de débats et d’une production législative et réglementaire abondante.

Tout d’abord, le principe de laïcité a valeur constitutionnelle. Comme le rappelle le rapport Stasi remis au Président de la République le 11 décembre 2003, « la laïcité, qui est consacrée par l’article 1 de la constitution de 1958 impose à la République d’assurer l’égalité devant la Loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion ».

L’Ecole a été le service public pour lequel les principes de neutralité et de laïcité ont dû faire l’objet de précisions nouvelles, notamment au travers de la délicate question du port des signes religieux à l’école. Aux termes de l’avis, rendu le 27 novembre 1989 à la demande du ministre de l’éducation nationale, le Conseil d’Etat a estimé que « le principe de laïcité de l’enseignement public, qui est l’un des éléments de la laïcité de l’Etat et de la neutralité de l’ensemble des services publics, impose que l’enseignement soit dispensé dans le respect, d’une part, de cette neutralité par les programmes et par les enseignants, et, d’autre part, de la liberté de conscience des élèves ». L’avis précisait que « la liberté ainsi reconnue aux élèves comporte pour eux le droit d’exprimer et de manifester leurs croyances religieuses à l’intérieur des établissements scolaires, dans le respect du pluralisme et de la liberté d’autrui, et sans qu’il soit porté atteinte aux activités d’enseignement, au contenu des programmes et à l’obligation d’assiduité ». Des limites étaient néanmoins opposées à l’exercice de cette liberté : la pression, la provocation, le prosélytisme ou la propagande, le fait de porter atteinte à la dignité ou à la liberté de l’élève ou à d’autres membres de la communauté éducative, de compromettre leur santé ou leur sécurité, de perturber le déroulement des activités d’enseignement et le rôle éducatif des enseignants, de troubler l’ordre dans l’établissement ou le fonctionnement du service public.

La loi interdit dans les écoles, les collèges et les lycées publics le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement leur appartenance religieuse.  Il appartient au juge en cas de contestation de veiller à ce que l’interprétation faite de ces dispositions par le chef d’établissement soit conforme à l’esprit de la loi.

Ces principes de neutralité et de laïcité ont été fortement précisés dans leurs modalités d’application en ce qui concerne l’Ecole. Ils s’appliquent en réalité à l’ensemble des services publics. L’avis du Conseil d’Etat en date du 3 mai 2000 (Melle Marteaux) précise « qu’il résulte des textes constitutionnels et législatifs que le principe de liberté de conscience ainsi que celui de laïcité de l’Etat et de neutralité des services publics s’appliquent à l’ensemble de ceux-ci ».

En second lieu se pose la question de la politisation des services publics. Par tradition, les modèles sociologiques nient à l’administration un pouvoir autonome. Au contraire, la fonction publique est présentée comme un objet au service de la société, exécutant les décisions souveraines du pouvoir politique. De fait, la Constitution de la Cinquième  République indique que le gouvernement « dispose » de l’administration. Par ailleurs, l’exécutif dispose du pouvoir de nomination aux emplois civils et militaires.

La réalité cependant n’est pas celle d’une distinction claire entre le politique émanation du suffrage universel, décisionnaire et souverain d’un côté et une administration exécutante d’autre part. Elle est au contraire caractérisée par un continuum politico administratif dans lequel l’un influence l’autre en permanence en vue de la prise et de l’exécution des décisions.

Ce continuum politico administratif se justifie sur un plan pratique. Le politique a besoin à la fois de conseil et de confiance. Conseil pour élaborer des politiques et des réformes réalistes et susceptibles d’être mises en œuvre avec efficacité ; confiance dans les dirigeants qui conduiront leur mise en œuvre.  Certains pays ont ainsi mis en place au fil du temps des dispositifs transparents permettant au pouvoir politique en place de s’appuyer sur un personnel administratif au service de la mise en œuvre des orientations gouvernementales. Le spoil system américain est sans doute le dispositif le plus connu et le plus spectaculaire.

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